Intégrer les matériaux biosourcés dans la conception architecturale
Le secteur du bâtiment est le premier secteur producteur de CO2
Alors que le secteur du bâtiment est reconnu comme étant le principal secteur producteur de CO2, l’utilisation de matériaux biosourcés peut, parmi d’autres axes d’amélioration, limiter son impact carbone.
Ces matériaux, lorsqu’ils sont issus du végétal, stockent du CO2 durant leur croissance et même après leur transformation : autant de CO2 qui ne contribuera pas au réchauffement de l’atmosphère. Par ailleurs, les matériaux de construction biosourcés sont durables, renouvelables et largement disponibles. Ils constituent un axe de réponse non négligeable à l’urgence climatique, tout en permettant de construire les équipements nécessaires à la société.
« Les matériaux biosourcés sont issus de la matière organique renouvelable (biomasse), d’origine végétale ou animale. Ils peuvent être utilisés comme matière première dans des produits de construction et de décoration, de mobilier fixe et comme matériau de construction dans un bâtiment »
(Arrêté du 19 décembre 2012 relatif au contenu et aux conditions d’attribution du label bâtiment biosourcé)
Le bois, la paille, le béton de chanvre, le linoléum, et même la laine de mouton… nombreux sont les matériaux biosourcés pouvant être mis en œuvre dans le secteur de la construction, en structure, en isolation, en revêtement de sol ou même en peinture. Ils sont aisés à intégrer, et ne nécessitent pas nécessairement une remise en question du système constructif (en isolation notamment). Lorsqu’ils sont employés en structure (charpente bois par exemple), les matériaux de construction biosourcés rendent plus aisée la rénovation des bâtiments existants, par la facilité de leur mise en œuvre sur le chantier et leur faible impact sanitaire.
Pourquoi intégrer une démarche biosourcée dans un projet ?
Des matériaux biosourcés naturellement avantageux
De par leur nature, les matériaux de construction biosourcés revêtent des propriétés naturelles qui peuvent améliorer le confort de l’utilisateur. Les matériaux hygroscopiques capillaires en isolation (notamment laine de chanvre, ouate de cellulose, panneaux de fibre de bois) s’adaptent naturellement, stockent l’humidité quand l’air intérieur est trop humide et la relâchent lorsque l’air est trop sec. Par ailleurs, leur capillarité empêche l’humidité de rester stocker dans les murs, et assure une plus grande pérennité du bâti, et ce particulièrement dans les bâtiments employant des matériaux traditionnels (notamment en restauration).
Aussi, les matériaux biosourcés sont particulièrement performants vis-à-vis du déphasage thermique (capacité à ralentir les transferts de chaleur, notamment pour le confort d’été). Ils représentent ainsi une alternative non seulement viable, mais parfois plus performante que les isolants plus conventionnels grâce à ce comportement hygrométrique amélioré et leur performance d’isolant thermique.
En structure, l’ossature bois construite en atelier représente un gain de temps non négligeable sur le chantier dont la conduite n’est que plus aisée. De plus, le bois a une résistance six fois supérieure au béton à poids égal, et est synonyme de durabilité et de pérennité.
Repenser le biosourcé dans une démarche coût global
Le coût des matériaux biosourcés, qui peut être perçu comme plus élevé que leurs équivalents conventionnels, est à relativiser. Même s’il ne représente pas automatiquement un surcoût par rapport aux solutions conventionnelles, sa mise en œuvre peut en effet s’avérer être un investissement plus coûteux (notamment dans le cas des murs en paille ou du béton de chanvre par exemple), dans la mesure où tous les matériaux ne bénéficient pas encore de techniques industrialisées aussi rentables que pour des matériaux dits conventionnels. Cependant, cet investissement est généralement amorti sur le long terme et présente une fin de vie plus aisée.
De plus, il est important de prendre d’autres critères en compte : il faut inclure les critères de responsabilité sociale et environnementale pour une vision à moyen et long terme, dans une notion de coût global et de sobriété. Avec un faible coût de transport et une fabrication peu coûteuse en énergie, le coût est réparti autrement : les frais annexes sont réduits et le prix payé est davantage celui du matériau.
À l’école Notre-Dame de Cesson-Sévigné (ci-dessus), le système constructif en ossature bois maîtrise les impacts environnementaux du projet (matériau naturel, renouvelable, peu coûteux en eau et en énergie). Aussi, il est gage de performances thermiques accrues.
L’architecte au service de solutions architecturales durables
Contrairement à certaines idées reçues sur le sujet, l’utilisation de matériaux biosourcés n’oblige pas à choisir entre performance et qualité environnementale : les matériaux biosourcés sont des matériaux performants, au moins autant que leurs équivalents conventionnels. Ils sont soumis aux mêmes contrôles et exigences réglementaires (incendie, acoustique, thermique, sismique, etc.).
Cependant, il est certain que les matériaux biosourcés sont exigeants : pour éviter tout vieillissement prématuré, il faut veiller à la qualité de leur mise en œuvre. La conception et le suivi de travaux doivent être exemplaires. Un bon nombre de techniques sont éprouvées et prédatent le béton (chanvre, paille, charpente bois, etc.). D’autres, en développement, sont l’objet d’innovations prometteuses (bétons biosourcés par exemple). L’architecte doit alors apporter son expertise au service de la maîtrise d’ouvrage, pour atteindre des objectifs de développement durable dans une approche ambitieuse et pragmatique.
L’intégration du biosourcé invite à reconsidérer la façon de concevoir, en se concentrant sur le gros et second œuvre plutôt que sur les finitions. Sur l’opération de l’école Sainte-Croix de Châteaugiron par exemple (ci-dessus), les panneaux utilisés sont bruts de finition. Avec l’emploi de matériaux biosourcés, le rôle de l’architecte est aussi de promouvoir une esthétique du matériau naturel.
Le rôle de conseil de l’Atelier des loges auprès des Maîtres d’Ouvrage et ses responsabilités sociales et environnementales dans la conception du cadre de vie sont essentiells. D’une part, le plan de formation permet à chacun de renforcer ses savoirs et savoir-faire relatifs à l’utilisations de matériaux biosourcés. D’autre part, la mise en œuvre de ces matériaux est non seulement conditionnée par les exigences réglementaires, mais elle obéit aussi à des règles d’exécution établies à partir de retours d’expériences et de bonnes pratiques observées sur le terrain.
À l’Atelier des loges, le plan de formation permet de renforcer les savoirs et savoir-faire relatifs aux matériaux biosourcés, que les bonnes pratiques observées sur le terrain viennent consolider.
L’approche environnementale, et notamment l’approche des matériaux biosourcés doit être à la fois interactive, réaliste et ambitieuse, afin de garantir une démarche de qualité environnementale effective et durable. Toutes les cibles sont analysées et abordées avec le Maître d’Ouvrage dans l’objectif de limiter les impacts écologiques des bâtiments, optimiser les consommations, et améliorer le confort des usagers.
Quelles bonnes pratiques vis-à-vis des matériaux biosourcés ?
Les matériaux biosourcés demandent surtout à composer avec justesse et bon sens. Car si les matériaux biosourcés revêtent un intérêt environnemental certain lorsqu’ils sont bien sourcés et bien conçus, il faut garder en tête qu’un matériau peut-être dit « biosourcé » même si ne rentre dans sa composition qu’une faible proportion de matière organique renouvelable. Il faut alors croiser les données de composition de ces matériaux avec leurs performances environnementales, leur origine géographique, savoir s’ils sont issus d’une filière vertueuse, etc. Par exemple, à l’Atelier des loges, le bois est issu de forêts gérées durablement et de provenance locale dès que possible, afin de réduire l’impact carbone lié au transport, et de participer à la montée en savoir-faire et au développement économique des acteurs locaux.
En parallèle de l’emploi de matériaux biosourcés, d’autres mesures sont complémentaires, comme l’approche low-tech, qui consiste à privilégier des solutions simples sans recourir à des équipements techniques complexes et coûteux en maintenance. Il ne s’agit pas de considérer le biosourcé comme une fin en soi mais bien comme un axe d’amélioration de la construction parmi d’autres.
Alors que l’intérêt autour des matériaux biosourcés invite de plus en plus à construire en intégrant des solutions vertueuses pour l’environnement et les individus, l’architecte endosse un rôle important : il doit être en mesure d’aiguiller la maîtrise d’ouvrage vers les options qui permettent d’accorder responsabilité sociale et environnementale, fiabilité et durabilité. L’architecte doit alors promouvoir les solutions durables, afin de susciter l’innovation et d’étendre la filière pour en faire bénéficier le plus grand nombre.
Quelques pistes pour mieux penser le biosourcé :
– Penser le biosourcé en coût global
– Intégrer les notions de responsabilité sociale et environnementale
– Reconsidérer le projet à l’échelle de l’opération (et pas simplement substituer un produit par un autre)
– À l’échelle du projet, trouver le bon périmètre pour les matériaux biosourcés : Quels espaces sont adaptés ? Quelle ambition ? (système constructif, isolation, etc. )
– Évaluer avec précision les cibles adaptées au projet en concertation avec la maîtrise d’œuvre, la maîtrise d’ouvrage et les utilisateurs
Quelques références employant des matériaux biosourcés :
– EHPAD La Vallée de l’Aulne à Châteaulin (29) : isolant laine de bois, bardage avec ossature bois, bardages bois en vêture protégée
– Lycée Raphaël Élizé à Sablé-sur-Sarthe (72) : isolant fibre recyclée, sol caoutchouc, peinture écologique
– Îlot Mortier à Laval (53) : surélévation ossature bois
– École Notre-Dame à Cesson-Sévigné (35) : construction bois, isolant biosourcé, sol linoléum, faux plafond en laine de bois compressé
– Collège Cleunay, Rennes (35) : charpente et ossature bois